Orianne Charpentier rencontre les élèves de Seyssel

Bilan de la rencontre avec l’auteure Orianne Charpentier 5 avril 2019

Trois classes de Quatrième participent au Prix Littéraire des Collégiens de Haute-Savoie. Depuis septembre les élèves lisent et préparent la rencontre du 5 avril 2019 afin d’accueillir Orianne Charpentier pour son livre Rage. Dans un premier temps, les élèves ont présenté leurs travaux : marque-page, réalisation d’un abécédaire, lettre à l’auteur, anthologie, montages vidéo, poèmes, affiches et slam.

Orianne Charpentier a été très émue par les productions présentées, dont le slam : « j’écris avec mes mots, vous écrivez avec ce que vous êtes, vos corps et vos doigts : vous avez recréé une œuvre à partir de la mienne ! Merci pour ce travail et votre talent ».

Puis chaque classe avait préparé des questions permettant un échange riche. Orianne Charpentier a partagé avec nous que le regard qu’elle porte sur son métier d’auteure a beaucoup évolué au fil du temps. Au départ elle pensait que c’était juste une envie d’écrire des histoires mais aujourd’hui il lui semble que c’est l’envie d’être aimée qui l’anime. Elle a beaucoup évoqué son adolescence durant laquelle elle doutait de ses qualités, elle avait peur de l’échec comme si toujours elle se voyait en négatif. L’envie d’écrire est née là et, au fil du temps, les faiblesses sont devenues des trésors ! Si ses premiers romans n’ont pas été édités, cela lui a permis de comprendre qu’être auteure n’est pas un jeu mais un « JE » rempli de mots, ressentis et émotions très personnels, une écriture sincère. Et c’est d’ailleurs ce qui nous a touchés : la sincérité d’Orianne Charpentier dans les mots, qu’ils soient écrits ou parlés.

Les élèves étaient curieux de connaître les origines du roman Rage. Rage est une héroïne arrivée dans la vie de l’auteure après les attentats du 13 novembre 2015, née de la peur engendrée par l’idée de perdre un être cher. Puis il y a eu une invitation en Allemagne au moment où des milliers de réfugiés arrivaient : habillés de manière légère en plein hiver, affamés mais surtout traumatisés. Elle se souvient plus particulièrement du regard des enfants : « il y avait quelque chose de cassé, de mort ». Elle évoque aussi les violences tout à fait singulières que subissent les femmes, violences qui ajoutent de l’horreur au difficile… Certaines femmes réfugiées ont témoigné, elles racontent la peur, la fuite, la faim mais plus lourds encore sont les silences. « Certaines situations explosent les mots ». Rage est née là, sans prénom, car il faut se reconstruire pour se nommer à nouveau ; sans prénom, pour se protéger car taire l’identité, c’est taire la part d’avant. Pour parler de ce personnage, il fallait des mots justes pour évoquer les maux : « mon roman doit évoquer la terreur traversée avec pudeur ; je n’ai pas de message, je partage une expérience, des émotions ». Rage, comme Antigone de Sophocle, sont des textes qui évoquent l’adolescence, la guerre, les violences faites aux femmes : la tragédie ; mais Rage comme Antigone sont des personnages qui ont un choix à faire : la vie ou la mort.

Un roman en partage pour permettre l’empathie : « l’empathie (souffrir avec l’autre) se cultive et l’art aide à cela par la littérature, la sculpture, la peinture ». En même temps, écrire ce roman a aussi été un moyen d’évoquer la lumière, l’espoir au travers des rencontres.

Orianne Charpentier est repartie avec cette impression que ce roman « nourri de parcelles syriennes », difficile, a été compris par nos jeunes élèves et apprécié. Nous repartons avec ce sentiment que chaque rencontre est unique, riche de regards différents sur le monde, une graine semée auprès de nos adolescents qui doivent inventer le monde de demain.

Collège de Seyssel

Publié le 05/05/2020
Modifié le 05/05/2020